Introduction au concept de diagnostic

Introduction

J’ai eu l’occasion, après la réalisation de mon article proposant une méthode d’approche pour la résolution de cas clinique, de constater que la notion et l’utilisation du terme diagnostic pouvait varier d’une personne à l’autre. Cette différence dépendant notamment de l’introduction qui avait pu être faite dans les IFSI à la notion de diagnostic infirmier.

Je me propose donc de reprendre avec vous ce que je place derrière le terme de diagnostic. L’objectif étant de rendre mon recours à ce mot le moins ambigu possible.

Définition

La prise en charge des patients repose sur la réalisation de « diagnostics », permettant de structurer les réponses alors proposées. 

Τoutefois si le diagnostic médical est une entité connue de tous, d’autres formes de diagnostics doivent pouvoir être utilisées. Il est par contre primordial d’éviter que l’utilisation de ce terme commun ne soit à l’origine d’amalgames. Surtout si celà risque d’amener leurs utilisateurs à dépasser leur cadre de compétence, ou les patients à recevoir des thérapeutiques inadaptées à leur état.

Il convient donc dans un premier temps de reprendre une définition acceptable par tous :

Diagnostiquer, c’est classer et homogénéiser « des problèmes » sous forme d’énoncés, (de diagnostics) réfléchis, structurés et standardisés.

Le terme standardisé signifiant qu’ils reposent sur un vocabulaire commun et des concepts facilement reconnaissables par tous. Ceci va permettre une transférabilité (à toutes personnes et dans toutes situations), et donc une utilisation « universelle » de ces concepts

Il n’y a ainsi aucune « exclusivité » médicale sur le terme de diagnostic.

Par contre, ce « classement réfléchi, structuré, standardisé » sera utilisé pour trier des notions nécessitant parfois des compétences particulières. Celles-ci limitant leur énoncé initial à certaines professions.

On va pouvoir ainsi définir un certain nombre « d’entité diagnostiques » différentes :

Diagnostic Médical

Selon la définition du Larousse, Il s’agit: « du temps au cours duquel le médecin identifie la nature et la cause de l’affection dont un patient est atteint ».

Il aboutit donc à l’énoncé d’une pathologie. 

Il repose sur des critères le plus souvent objectifs (imagerie, analyse biologique, anatomo-pathologique). Leur classement repose sur la Classification Internationale des Maladies (CIMX).

Ils peuvent être regroupés selon les organes (cardiologie, pneumologie…) ou selon la physiopathologie (processus infectieux, obstructif…). Ce dernier choix étant celui retenu en IFSI.

L’objectif étant, au vu de la pathologie, de pouvoir proposer un traitement.

La plus grande limite pour les infirmiers ou étudiant en IFSI, est que la détermination de ce diagnostic doit être faite par un médecin. Le personnel soignant pouvant utiliser le terme définissant la pathologie une fois celle-ci définie par le médecin

Diagnostic Infirmier

Définition : Il s’agit « d’un énoncé concis, actuel et probable des manifestations de dépendances de la personne, regroupées ou non et reliées à une source de difficulté ». A l’inverse du précédent il ne correspond pas à l’énoncé d’une pathologie. Il décrit une dépendance, et est centré sur la capacité du patient à satisfaire, en autonomie, ses besoins. Cette dépendance étant le fait, le plus souvent, des conséquences de son état de santé. 

Leur classement repose le plus souvent sur 14 besoins définis par Virginia Henderson. leur détermination est du rôle propre de l’infirmier. Toutefois d’autres classements sont parfois proposés, dont un utilisant un mode d’approche fonctionnel.

L’objectif est de pouvoir proposer un projet de soins permettant d’anticiper, de prévenir ou de traiter la dépendance du patient et ses conséquences.

N’étant par définition pas un « expert » des diagnostics infirmiers je vous laisserai faire les recherches nécessaires si vous souhaitez approfondir ces notions.

La limite souvent exprimée est un classement très théorique difficile à utiliser en pratique quotidienne. 

Par ailleurs ce diagnostic trouve, selon moi, toute sa place dans la prise en charge infirmière au long cours. Pour les patients dont la stabilité rend inutile de nouvelles évaluations « médicales » (au sens « étude de la pathologie » en vue de modifier les traitements en cours), cette approche semble particulièrement pertinente. En effet la maladie ayant été établie et les traitements mis en place, la persistance de façon chronique, pour un temps déterminé ou non  d’une dépendance nécessite une prise en charge « infirmière » (centrée sur les besoins) et non plus « médicale » (centré sur la pathologie) tels que les mots ont été définis ci-dessus.

Intégration de ces deux diagnostics

Il est important de noter que ces 2 entités sont complémentaires et ne se substituent pas l’une à l’autre. De plus les termes ne sont pas exclusifs quand aux personnes participant aux différentes prises en charges. 

Les Infirmiers ont toute leur place lors de la détermination du diagnostic médical. (par la réalisation de différents actes sur prescription notamment). De la même façon les médecins peuvent être amener à organiser certaines interventions (kinésithérapie, psychomotricien, pédicure, orthophoniste..) après établissement d’un diagnostic infirmier, et dans le cadre du projet de soins correspondant.

Il existe bien évidemment une relation entre les deux. Ce sont souvent des pathologies devant bénéficier d’un diagnostic médical qui sont à l’origine des dépendances mises en évidence lors des diagnostics infirmiers. On peut toutefois imaginer que dans certaines situations (secteur pénitentiaire, grand âge…), l’environnement soit grandement responsable des « dépendances ». Un diagnostic médical s’avèrera alors inutile car ne pouvant déboucher sur aucune thérapeutique susceptible de faire diminuer la dépendance.

Rencontre d’un troisième type

Les diagnostics médicaux et infirmiers ayant été précisés, il convient de revenir à la résolution des cas cliniques que j’ai pu proposer. 

Lorsqu’il existe une modifications de l’état de santé du patient, nécessitant une réévaluation médicale (déséquilibre d’une pathologie chronique ou apparition d’une pathologie aigue), les actions à réaliser par l’IDE, tant qu’il est seul, peuvent ne pas s’intégrer dans les définitions évoquées plus haut :

  • Le diagnostic médical ne peut pas et ne doit pas être réalisé par l’IDE,
  • Le diagnostic infirmier peut parfois ne pas être adapté à cette prise en charge en aigüe. Ceci y compris lorsqu’on utilise l’approche fonctionnelle.

Il y a donc la place pour ce que j’appelle une autre « sorte de diagnostic ». (Le terme étant employé dans la mesure où il doit correspondre à une classification homogène sous forme d’énoncé, réfléchis, structuré et standardisé tel que évoqué plus haut). L’idée étant d’utiliser quelque chose de plus apte à permettre à l’IDE de progresser dans la situation.

Cette « entité diagnostique » n’a pas d’existence reconnue dans les différentes instances professionnelles. Elle ne constitue qu’un outil que je vous propose pour résoudre les cas auquel l’infirmier ou l’étudiant peut être confronté.

L’idée étant alors non pas de définir une pathologie ou un besoin, mais plutôt une dysfonction, susceptible d’orienter la suite de la prise en charge.

Si on devait faire un rapprochement avec l’activité secouriste, on pourrait parler de diagnostic « fonctionnel ou lésionnel », comme on parle de bilan fonctionnel ou lésionnel.

La différence entre bilan et diagnostic reposant selon moi sur le principe qu’un bilan correspond au recueil de données (de symptômes). Or celui-ci ne constitue que l’étape initiale d’un diagnostic. Ce dernier étant, par définition et quelque soit le type de diagnostic évoqué (médical, infirmier ou fonctionnel…) suivi par une démarche diagnostique visant à la mise en évidence:

  • D’une pathologie (diagnostic médical),
  • D’un besoin (diagnostic infirmier),
  • Ou d’une dysfonction. C’est ce « 3ème type » de diagnostic que je vous propose d’utiliser dans les études de cas. Et ce notamment dans le cadre de l’urgence.

Cette étape diagnostique, telle que j’ai pu l’évoquer dans l’article sur la résolution de cas clinique, va avoir comme objectif de rechercher des altérations des grandes fonctions. Pour autant il ne s’agira pas de nommer des pathologies (qui correspondrait alors à un diagnostic médical). 

Il pourra s’agir d’atteintes des fonctions 

  • respiratoire, 
  • circulatoire, 
  • neurologique, 
  • métabolique (glycémie), 
  • digestive, 
  • urinaire, 
  • immunitaire (sepsis), 
  • squelettique, 
  • psychologique,

qui seront donc à rechercher à partir des symptômes observés.

Intérêt

La différence et la plus-value par rapport aux prises en charges secouristes reposera ainsi sur la compétence et la capacité de l’IDE à ne pas se laisser entrainer dans des raccourcis tels que : dyspnée = détresse respiratoire. 

A la différence du secouriste, l’IDE sait que l’acidose que l’on retrouve par exemple dans le cadre de complications du diabète entraine lui aussi une polypnée. 

Ainsi devant un trouble de la ventilation (mouvements ventilatoire), l’IDE pourra rechercher à l’aide de l’interrogatoire (antécédents, mode de survenue…), de l’observation (cyanose sueur…), de la saturation en oxygène en air, de la glycémie capillaire, si le tableau correspond plus à une altération de la fonction respiratoire, ou de la fonction métabolique de régulation de la glycémie par exemple. 

Le diagnostic médical visant à définir la pathologie précise (insuffisance cardiaque, asthme, acido-cétose, ou acidose lactique… dans notre cas), restant de la responsabilité du médecin.

Dans un certain nombre de cas la dysfonction pourra être évidente, dans d’autres simplement évoquée ou redoutée. 

C’est pourquoi, lors de la résolution de cas clinique, je  proposais l’utilisation de 3 catégories. Ces dernières étant d’ailleurs communes avec celles de la Classification en catégorie proposée pour les diagnostics infirmiers par l’ANADI : 

  • Présent, Actuel,
  • Possible,
  • Susceptible de, A risque.

Utilisation pratique

A titre d’exemple on peut ainsi considéré que devant une personne présentant des vertiges et une instabilité, l’IDE pourra évoquer une altération des fonctions

  • circulatoire (hypotension à l’origine d’un bas débit cérébral), 
  • métabolique de la régulation de la glycémie (hypoglycémie), 
  • neurologique (atteinte cérébrale). 

L’IDE pourra donc proposer les « diagnostics possibles » d’atteinte circulatoire, métabolique et neurologique

La personne présentant par ailleurs un « diagnostic à risque » de chute.

La réalisation d’un bilan 

  • circulatoire avec prise de pouls, TA notamment, 
  • métabolique avec réalisation d’une glycémie capillaire, 
  • neurologique avec recherche de déficits neurologiques focalisés, d’atteinte pupillaire… 

permettra le cas échéant de parvenir à un « diagnostic présent » :

La présence d’une hypotension artérielle à 70 mmHg de PAS, d’une tachycardie à 140 bpm, avec une glycémie capillaire à 1g80, sans déficit neurologique focalisé conduira au « diagnostic présent» d’atteinte de la fonction circulatoire. Il permettra de proposer une position d’attente adaptée, l’appel d’un médecin, un conditionnement avec pose de voie veineuse périphérique et même un remplissage en présence d’un protocole le permettant. L’arrivée du médecin permettra de poser le « diagnostic médical » et de traiter la pathologie ainsi mise en évidence.

Inversement, une hémodynamique correcte avec une glycémie capillaire à 0,3 g/dl permettra de porter le « diagnostic présent» d’altération de la régulation de la glycémie. On pourra alors proposer un resucrage per-os (le patient étant conscient), avant de contacter le médecin pour qu’il puisse poser un « diagnostic médical » : inadéquation de la prise alimentaire, surdosage en insuline, interaction médicamenteuse, sepsis….

J’espère que ce petit article permettra d’utiliser au mieux la méthode de résolution de cas clinique évoqué en introduction et de dissiper les possibles difficultés.

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